Je traverse la Provence, je traverse ses garrigues, ses forêts, ses plaines, ses vallées, ses gorges, ses sommets, les chemins sillonnent entre des massifs parfumés qui appellent la cuisine du soleil. Je traverse ces villages où les cyprès tiennent la garde et les platanes les fondations. Je tends l'oreille pour relever les accents chantants, j'observe l'art et la manière de rester en terrasse à ne rien faire. Je ressens ce rythme au ralenti que les chaleurs imposent. Cette Provence estivale est guindée , les belles voitures défilent, les caméras telles des champignons clignotent à chaque détour de ruelles, de chemins. Les femmes sont élancées, gracieuses et ont le teint provençal; les hommes sont sportifs, les épaules hautes et le col ajusté. Cette Provence "vitrine" est tout de même assez coincée, peu avenante et peu chantante. J'ai connu plus d'ambiance dans les bars PMU du midi. Mais bref passons car je sais au fond de moi que son vrai visage s'exprime autour des grandes tablées en famille, sous d' immense pergola de muscat, où les plats méditerranéens embaument d'huile d'olive et d'herbes provençales, les enfants galopent sous les oliviers, les pères disputent une partie de boules un pastis à la main et les femmes un verre de rosé saumoné en riant de leurs époux râleurs.
La vrai Provence c'est comme ailleurs, c'est chez soi en famille, entre amis et autour d'un joyeux repas qu'elle s'exprime. Mais dès lors que du plat pays les jambes se lancent vers les massifs Alpins c'est une tout autre Provence qui rayonne, plus authentique, plus discrète, plus paysanne, plus sauvage. Il faudrait alors se plonger dans l'un des merveilleux romans de Jean Giono pour se saisir des plus belles images pour la dépeindre.
Puis je ne cherche rien de particulier, j'ai espoir que ce qui doit arriver arrive lorsque nous sommes dans les dispositions adéquates. Alors je marche, je marche puisque c'est à l'évidence l'une des plus agréables manières d'être la plus belle version de moi-même. Durant la journée, une fois que mon corps a trouvé son rythme et que je peux laisser le flux de mes pensées flotter, alors c'est un état méditatif profond auquel je goûte. Cette mélodie respiratoire qui abreuve chaques cellules de mon coeur arrive à me détacher des paysages souvent sublimes, j'avance alors quasi à l'aveugle, mes pieds connaissent déjà intimement le sol, mon regard est comme figé vers mon moi intérieur et je rêve en marchant. Dans cet état de conscience c'est juste une sensation qui me remplit, une légèreté intense qui me porte, un moi enfin libéré du corps physique, un soi qui peut voir au delà de l'horizon.
Mais pour ce faire j'ai encore besoin de ce repli en pleine nature, d'une distance certaine avec l'agitation émotionnelle des hommes, loin des décors de la civilisation. Alors je marche et je rêve d'arriver à guider mes esprits vers cette plénitude élargie, qui lorsque je m'y baigne des heures durant puis que j'en reviens, me permet d'offrir à la vie qui m'entoure la plus belle version de moi-même, l'amour aveuglément.
O4V
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