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  • Photo du rédacteurO4V

Parenthèse byzantine

Il est 4h30 et je suis désormais sur la place du village, un thé anglais bien chaud coule dans ma gorge et réchauffe mes pensées dirigées vers le planning de la journée. Comment m’y prendre, je sens que ce jour marque un lâcher prise précieux dans le fait de me mouvoir à pieds ou par des moyens motorisés. Je souhaite rejoindre Ravenne, son centre historique chargé d'histoire, fief du poète Dante et sa myriade de mosaïques Byzantines. Le verdict tombe à 7h, j’ai décidé de marcher encore une matinée via la vallée de Bagno de romagna puis de prendre un bus dans ce village célébré pour ses thermes et sa basilique aérienne, je transiterai alors par Cesena puis enfin Ravenna. Ces dernières foulées dans la forêt sacrée ont déjà cette arrière goût nostalgique, mon état d’esprit n’étant pas à la hauteur de ce haut lieu naturel j’ai déjà des regrets, un jour je reviendrais et je gravirai à nouveau le mont Falco pour embrasser du regard ces immenses étendues boisées. Quelle sensation étrange de parcourir 70 km sans faire chauffer les semelles, je sens comme une énergie contenue mais précieuse pour rééquilibrer le corps et l'esprit. À 16h30 je descends enfin du Bus je suis au centre de Ravenne. Je fuse alors vers la basilique st. Apollinaire Nuovo pour me laisser convaincre de prendre mon pass 6 monuments UNESCO. En 2h30 je suis éblouis par des constellations de mosaïques multicolores, des architectures byzantines affûtées et des ambiances sacrées qui me projettent dans les nuages. Le Museo arcivescovie e. Cappella di S. Andrea me témoigne de l’importance de la cité au sein de la bulle chrétienne, de sa puissance en tant que capitale de l’Empire romain d'Occident et enfin le discret Battistero Neoniano qui de l’extérieur ne laisse absolument pas imaginer le splendide qui tapisse entièrement ses murs intérieurs . Ces lieux sont sous l’emprise du génie artistique et chacun d’eux a le pouvoir de vous porter vers l’élévations spirituelle ne serait ce qu’un instant. En contemplation au cœur de ces trésors il me semblerait presque être encore dans ces forêts de Romagne où la lumière se diffuse en présence religieuse. Malheureusement tout ceci est impénétrable à ceux qui préfèrent shooter chaque cm² pour alimenter les réseaux sociaux, le cœur a tellement à perdre de ce manège grotesque, c’est comme prendre en photo les vitraux de Pierre Soulages pour les regarder plus tard, chez soi et devant la TV. Tout se lie enfin, depuis la forêt jusqu'à ces œuvres somptueuses la passerelle est bien réelle, je peux enfin savourer ma parenthèse citadine. Ce besoin de décalage dans la fourmilière se faisait de plus en plus fort, je sentais bien que mon isolement pesé lourdement sur la balance et je ne profitais plus de l’instant présent. La cité de Ravenne dévoile des apparats raffinés, le dédale de ses rues pavées qui s’ouvre sur des superbes places ventilées, ses couleurs chaudes attrape - lumière, ses nombreux espaces verts et ses pins séculaires qui veillent le long des strada ; puis évidemment l’ambiance feutrée des restaurants qui déploient leurs artifices, bougies, nappes blanches immaculées, classique à l’italienne qui contraste avec le revers plus viril des hormones qui s’affolent devant les dribbles de la Liga. Ce n’est pas ma première ville depuis le début de l'exil vers l’Est, mais j’ai encore quelques tips à trouver pour passer la nuit dehors… mais pour l'heure c’est pize, moins de 10 euros avec un pichet de rouge sulfité à l’excès, mais nécessaire pour favoriser l’endormissement proche des axes routiers ; j’ai fait un peu de repérage j’ai donc une trajectoire possible, le minimum dans ces situations. Je suis au fond de la salle, table carrée en bois, chaise paillée, couvert inox dans leur pochette et un verre à ballon, la salle de la pizzeria Ca’rossa fait dans l’authentique, je sens que je suis à la bonne place. Pizza rossi, un demi de vin juteux, un tiramisu, une Grappa, woaw je suis paré pour allé dormir mais je suis beaucoup trop chaud après tout cet alcool, je dois donc me contenir et veiller à un peu de sérieux. Après cette soirée pur jus je suis bien inspiré pour vous réécrire "les contes de la Folies ordinaires" de c. Bukowski… qu’est ces que j’aime ces resto sans chichi où ca sonne vrai dès le départ, pas ces tablées bianco vierge de toutes tâche de vino où les bougies s'agitent sous le roucoulement des mâles, qui chantonnent toute la soirée en face à face avec des princesses pleines de rêves à paillettes, alors que le dit Prince ne veut juste qu’un bon coup d’un soir, puis un cigare avec les compères pour vanter son endurance vers l’olympique orgasme, tout en mimant des coups de reins dans le vent de la vulgarité. Ahaha j’en fais des caisses, Charles sort de ce corps, revenons plutôt aux effets dantesques qu’ont cette pizza gourmande et les effluves d’éthanol qui font flotter mon esprit… Car les Italiens ont bel et bien de la classe et prennent grand soin de leur patrimoine passé autant que présent, Ravenne intègre avec magnificence l’ancien et le moderne et ses rues sont assez propres pour dormir par terre… néanmoins pas un seul vagabond en vue, c’est tout de même étrange. Par ailleurs les femmes en Italie semblent tout a fait épanouies, leurs cheveux en volume qui ondulent en cascade dans leur dos nus en cette période, leur silhouette généreuse, un regard en marbre noir qui vous change en sable, il y a dans leur ADN, je pense, des griffes de panthère. Je sors enfin du restaurant, je suis le dernier, je coule les dernières gouttes de ma Grappa dorée, je règle puis je file tête baissée avec en tête le parc du Mausoleo Théodoric, en face, pour un bivouac sauvage. Pas de bol entre temps il a fermé et j’ai trop bu pour tenter de grimper les grilles surmontées de piques, un demi Litre de vin italien des plaines ça monte aussi vite qu’une 8.6. maturée au soleil du midi… Je suis bien gay donc je garde espoir, je me retourne et je vois au dessus du resto la terrasse d’un café apriori plus utilisée, c’est isolé, à l'abri, je vais dormir là. La nuit est douce, peu de circulation au final, et je me sens à l’aise où je suis. Lendemain réveil 4h et des brouettes, tout pimpant, je rassemble mes affaires, fait ma toilette de chat puis je file trainer au bord de la Marina pour faire le plein du lever du soleil, puis 1h à squatter le McDo de la gare en réclamant de l’eau chaude à la serveuse (ça me permets de boire mon thé gratis), pour notamment charger mon téléphone. 8h30 je file j’ai rendez vous avec la Basilique San Vitae puis le mausolée Galla Placidia… mais quelles merveilles, j’ai rarement vu chef d’œuvre aussi époustouflant, on touche au divin c’est une évidence. Toutes cette excursion en terrain pontifical est un pur plaisir pour les yeux, c’est une source d’inspiration immense… je décide de passer l’après-midi à la bibliothèque Classence, au sein d’une abbaye svp, pour inaugurer la newsletter « nouvelles de vive voix » (disponible sur mon Soundcloud), puis je retrouve mon hôte couchsurfing, Monia, avec qui je partage un joyeux repas et un authentique moment bel et bien humain. Quel réconfort de partager un instant avec de belle personne comme elle. Le lendemain après une matinée où je traine pour profiter du confort du logis, je quitte Ravenne à pieds vers les réserves Sauvages du Delta du Pô, un bird parc façon Steven Spielberg où le Ciel est une chorégraphie perpétuelle de centaines de silhouette à plumes venues des 4 coins du monde… mais ça c’est une autre histoire. To be continued !









O4V


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